Nous sommes au bout du monde
Cette fois-ci pas de doute, nous pouvons le crier haut et fort, nous sommes au bout du monde et seulement 1 000 km nous séparent de l’Antarctique et une poignée de kilomètres de la zone internationale.
Contrairement à Punta Arenas, la ville s’avère beaucoup plus accueillante. Tout est axé sur le tourisme et c’est même un peu trop commercial pour nous mais il est agréable de se promener dans une cité qui respire le bon vivre un peu plus de richesse et de se laisser prendre aux jeux des panneaux et autres indications comme quoi nous sommes au bout du monde. Difficile de résister à faire des photos avec les pingouins dessinés sur un mur au hasard d’une route, du panneau officiel d’Ushuaia ou encore des éternels indicateurs des distances avec les villes. D’ailleurs en tant qu’explorateur de l’extrême, nous avons même le droit à un joli tampon sur le passeport et un diplôme. Une bêtise qui fait sourire mais un joli souvenir tout de même.
Nous déambulons dans Ushuaia, nous amusant de toutes les conneries vendus par les commerces à gogo, le tout ou presque
fabriqué en Chine, essayant de deviner parmi les touristes qui fait le grand saut jusque l’Antarctique… Il faut dire qu’ici les dernières minutes ne manquent pas et nous apprenons vite qu’il y en a tous les jours tellement le nombre de bateaux est impressionnant. De notre côté, l’Antarctique sera pour un autre voyage et en attendant nous profitons de la ville et de son incroyable paysage. La cité est coincée dans le canal de Beagle et ses montagnes perpétuellement enneigées superbes.
Le canal de Beagle justement nous décidons d’y faire un tour. Après tout, il serait dommage de ne pas aller voir les deux océans les plus immenses du monde se rejoindre dans un cadre hallucinant beau. Nous embarquons à bord d’un petit bateau (comme à notre habitude nous privilégions les petits groupes à défaut de pouvoir échapper aux touristes) pour 4h de navigation et de stupéfaction. Au programme 3 îles du bout du monde couvert d’animaux et de végétation étonnante. Dès que nous quittons le port, nous en prenons plein les yeux. Le paysage est tout simplement magnifique et magique. Les hautes montagnes enneigées se reflètent dans l’océan et semblent même y tomber. Bleu, blanc restent les deux couleurs de référence tandis que de nombreuses petites îles faites de rochers (qui l’hiver doivent être complétés par des icebergs) sont couvertes d’oiseaux. Pas de pingouins car il fait trop chaud mais des lions de mer, des centaines de cormorans, viennent se prélasser au soleil et faire la sieste. Nous avons déjà vu à de nombreuses reprises des lions de mer mais rarement d’aussi près et surtout dans un cadre aussi beau. Ici, avec les montagnes, nous sommes vraiment dans le cadre idéal pour les observer d’autant plus qu’à cette période de l’année les petits viennent de pointer leur bout du nez tandis que les grands troquent leur fourrure d’hiver pour celle d’été. Et oui ils sont comme nos chats.
Il est toujours très rigolo de les voir faire bronzette sur les rochers en se chamaillant dans de grands cris tandis que les mâles essaient de remettre un peu d’ordre parmi leur harem. Pas difficile de reconnaître les mâles tant ils sont gros et imposants. De plus ils sont beaucoup plus noirs que les femelles. Sur la petite île de Lesbos, ils sont des centaines, serrés sur ce petit bout de terre perdu dans l’immensité océanique avec au loin les montagnes qui semblent marcher sur l’eau et avec l’effet d’optique se rapprocher.
Un peu plus loin, les rochers arborent une couleur orangée, ocre tandis que la petite île de Parajos dévoile ses mystères. Ce ne sont pas les loups de mer mais bien les oiseaux qui se partagent l’espace. Canards (et même au bout du monde), cormorans, quelques pingouins créent une immense palette de noir et de blanc. Nous en avons rarement vu autant niché et piaillé dans un si petit espace. Nous continuons notre route sur les traces des grands explorateurs d’antan jusqu’à l’ile Faros.
Non ce n’est pas le phare le plus au bout du monde mais il marque le début des eaux internationales et quelque part la fin du monde. C’est assez émouvant de savoir que quelques centimètres plus loin, chacun est libre et la terre n’appartient plus à personne mais à tout le monde. Nous sommes vraiment au bout du bout du monde dans un cadre toujours aussi beau. Avec tous les pays que nous avons traversé et tous les peuples que nous avons rencontré, se retrouver là c’est un peu comme si nous mixions toutes ses cultures rencontrées en leur rendant hommage. Se dire qu’en plus le phare le plus mythique pour tous les explorateurs a été fait pas des français, nous rend fier quelque part. Bon allez un peu de chauvinisme ne fait de mal à personne.
Nous finissons notre épopée sur les traces des navigateurs d’antan par les îles bridges. C’est là que vivaient il y a quelques milliers d’années, les premiers habitants du bout du monde. Et figurez-vous que malgré le froid, le vent et les éléments plus qu’hostiles, ils y ont habité pendant plus de 600 ans en n’ayant pour tous vêtements qu’une simple huile qu’il enduisait sur leur corps. Dingue de penser qu’ils ont vécu nus dans ce climat. Aujourd’hui, seule une femme vit toujours, le reste de la population a été décimé par les colons espagnols et les maladies transmises par les « blancs ».
Sur l’île, il ne demeure aucune trace ou presque de leur passage si ce n’est un trou dans le sol qui leur servait soi disant pour le feu et quelques pierres. Pour le coup, nous sentons l’attrape touriste mais bon disons qu’il s’agit du folklore. En revanche, ce qui est intéressant, c’est de trouver pile à l’endroit ou les deux océans se rejoignent avec à gauche le Chili et le Pacifique et à droite l’Argentine et l’Atlantique. Le soleil déclinant sur les fjords leur donne une couleur impressionnante. On dirait qu’ils s’illuminent et deviennent blancs éclatants.
Sur l’île, pas d’oiseaux ou de loups de mer mais une flore riche. Les couleurs forment un arc en ciel. Jaune, rouge, orange, vert… se superposent avec les fleurs, les petits bosquets épineux ou non, les mousses vertes très claires voire fluo qui poussent sur les rochers au point de les recouvrir comme un manteau… Nous nous frayons un chemin parmi la végétation, humant au passage les odeurs, nous arrêtant pour admirer quelques fleurs étranges… Nous poserions bien la tente dans ce petit coin de paradis où la seule exception est le froid mais il nous faut déjà rejoindre Ushuaia et quitter les merveilles du bout du monde.
23/11/2011
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